Le métier d’Illustratrice scientifique

10 septembre 2025 Christophe Martin

Léa est une illustratrice scientifique et une artiste 3D épanouie.
Elle a intégré Imascience il y 4 ans et y apporte tout son talent d’artiste.
Mais je préfère lui laisser la parole pour qu’elle nous parle elle-même de son métier.

Léa Leroux

Léa Leroux artiste 3D

Laisser tomber les certitudes

Je n’ai pas toujours su que je voulais faire un métier créatif. Pendant longtemps, je pensais devenir vétérinaire. J’étais en prépa ATS bio, avec des cours exigeants, beaucoup d’apprentissage par cœur… et de moins en moins de plaisir. J’ai besoin de comprendre, de visualiser, pas simplement d’aligner des faits. Pendant cette période, je dessinais beaucoup. C’était un peu mon refuge.

Un jour, j’ai fini par me dire que je pouvais peut-être faire quelque chose avec ça. Pas avec un plan de carrière tout fait, pas avec un rêve précis, mais avec cette envie de dessiner, de créer. Je suis tombée un peu par hasard sur une affiche de l’école MJM. J’ai choisi Nantes, un peu sur un coup de tête, parce que j’y voyais une suite possible, une ville que j’avais déjà commencé à m’approprier.

Premiers pas dans la 3D

La 3D, je ne connaissais pas. Je l’ai découverte à l’école, en même temps que tout le monde, ou presque. Au départ, je me disais vaguement que le cinéma, pourquoi pas. Mais je n’avais pas d’obsession pour les jeux vidéo ou l’animation. J’avançais sans plan précis, avec curiosité.

Quand j’ai commencé chez Imascience, c’était mon premier vrai contact avec le monde professionnel dans un domaine artistique. Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. Pour ne pas arriver complètement perdue, j’ai passé mes vacances à me former à Blender — je venais de 3DS Max — en autodidacte. Je voulais pouvoir commencer sereinement.

Trouver sa place chez Imascience

J’ai vite compris qu’Imascience se situait à un croisement : ce n’est ni de la pub, ni du cinéma, ni de la vulgarisation pure. C’est autre chose. C’est de l’explication par l’image, parfois très précise, parfois plus poétique, toujours exigeante. Ce que j’aime, c’est que chaque projet est différent. Chaque sujet m’oblige à comprendre, à représenter autrement. Il n’y a pas de routine, pas de répétition.

Ce que j’ai retrouvé ici, c’est aussi une ambiance de travail qui me convient. Une petite équipe, où tout le monde a sa place, où la polyvalence est normale. J’avais connu ça à l’EFS, et ça me va bien. Je n’ai jamais travaillé dans une grosse boîte, et à vrai dire je n’en ai pas envie.

Quand la science devient image

Core-Biogenesis

Core-Biogenesis

La science ne m’était pas étrangère. J’en viens, en quelque sorte. Ce qui me plaît en tant que illustratrice scientifique, c’est cette alliance rare entre rigueur et créativité. Le premier projet qui m’a marquée, c’était une double page pour Core Biogenesis, avec un univers tout vert, des membranes cellulaires, des bicouches lipidiques, une coupe ouverte pour montrer l’intérieur. C’est l’une des illustrations que j’aime toujours autant aujourd’hui. J’y ai mis du temps, mais j’ai aimé chaque étape. C’est aussi à ce moment-là que j’ai commencé à toucher aux nodes sérieusement.

Je ne suis pas quelqu’un qui s’enflamme facilement. Je ne me suis pas dit un jour : « C’est ça que je veux faire ! ». Ce n’est pas mon tempérament. Mais j’aime ce que je fais, profondément. Et ça me suffit. C’est épanouissant.

Le goût du concret

Une bonne journée de travail ? C’est une journée où j’avance. Où je suis à fond dans mes nodes, où je réfléchis à comment résoudre un problème visuel ou technique. Ce que je préfère, c’est ça : chercher, tester, ajuster. C’est presque de l’ingénierie, en fait.

L’illustration et l’animation, ce n’est pas le même rapport au temps. L’image fixe, on peut la peaufiner, pousser les détails à l’extrême. L’animation, il faut penser le mouvement, l’ensemble, éviter les défauts à chaque instant. Ça demande une vision plus large, une gestion plus fluide de l’espace.

Gagner en justesse

Je commence toujours par chercher des références. Je veux savoir à quoi ressemble vraiment ce que je dois représenter. J’essaie de comprendre les mécanismes, les échelles. Ensuite, j’adapte au style demandé. J’ai toujours préféré expliquer avec des dessins. Même dans mes études. J’ai une approche très visuelle des choses. J’ai besoin de voir pour comprendre, et j’aime montrer pour faire comprendre.

Je ne me considère pas vraiment comme une technicienne, même si je manipule des outils complexes. Je dirais que je suis une artiste. Une artiste qui fait passer des idées, des savoirs, des mondes invisibles. Et qui le fait de manière lisible.

Quand mes grands-parents me demandent ce que je fais, je leur montre des vidéos, des exemples. Je leur dis que je crée des images de science, par ordinateur. Et quand je parle à des gens plus à l’aise avec la technique, je parle d’animation 3D, de vulgarisation, de création sur mesure pour des entreprises de recherche ou de santé. Ce n’est pas Pixar, mais ça parle de choses bien réelles.

Des images qui restent

Parmi les projets les plus marquants, il y a NOF, une immersion à 360°. C’est très différent d’un film classique : on ne peut rien cacher, tout est visible. Il faut penser l’espace autour, partout. Et dans ce projet-là, il fallait entrer dans une matière complexe, entre le liquide et le solide, faire ressentir ça. Il y avait des limites techniques à cause du casque VR, mais on a réussi à créer quelque chose d’immersif, qui parlait au client. C’était difficile, mais stimulant.

Je suis aussi attachée à une illustration plus douce, que j’ai faite sur iPad, en dehors de mes outils habituels. Une coupe d’organe, avec différentes pathologies du foie. J’ai aimé le moment, le processus. Et j’aime toujours le résultat. Il y a des images qu’on oublie vite, d’autres qu’on garde.

Cirrhose-Fibrose-du-foie

En quatre ans, j’ai gagné en technique, en rapidité, en efficacité. J’ai aussi affiné mon regard artistique. Je pense que je prends mieux les retours critiques qu’avant. J’arrive à mettre de la distance entre ce que je fais et qui je suis. À ne pas tout prendre à cœur. Ce n’est pas inné chez moi, c’est venu avec le temps.

Si c’était à refaire ?

Si je devais parler à la Léa d’avant MJM, je ne lui dirais pas de changer de voie. Parce qu’au final, même avec les détours, je suis là où je dois être. Dans un métier qui me ressemble : à la croisée des sciences et de l’image.

J’ai encore plein de choses à apprendre. J’aimerais explorer plus de sujets liés à la recherche, aux maladies, à l’espace… mais pas forcément les plus spectaculaires. Ce qui m’attire, c’est comprendre. Créer à partir de cette compréhension.

Tenter, créer, recommencer

À une jeune illustratrice qui hésite, je dirais : tente. Il n’y a rien à perdre. Il ne faut pas se brider par peur d’échouer. C’est en essayant qu’on trouve.

Moi, j’aime bien mes journées. Et c’est déjà beaucoup.

Léa Leroux
Responsable du pôle 3D chez Imascience.